Hadopi 2: l'Assemblée tombe dans le piège des mails
FAIL - Les députés ont adopté un amendement interdisant la coupure d'une messagerie électronique en cas de téléchargement. Mais comment l'appliquer, en cas de suspension d'Internet, une des sanctions prévues? C’est le couac — ou le fail — du jour. L’Assemblée nationale a décidé mercredi matin, dans le cadre du projet de loi Hadopi 2, qu'un internaute coupable de piratage ne pourrait pas être sanctionné par une coupure d'accès à sa messagerie électronique. Ce qui paraît bizarre: comment peut-on suspendre la connexion Internet d’un «téléchargeur» tout en lui laissant l’accès à ses mails?
Cette incongruité n’a visiblement pas été relevée puisque, à l'unanimité, les députés de la majorité et de l'opposition ont adopté deux amendements en ce sens présentés par Lionel Tardy (UMP), Jean-Dionis du Séjour (NC), Martine Billard (Verts) et Jean-Pierre Brard (PCF). Même le gouvernement a dit OK.
Sauf que dans l’un de ces amendements, c’est écrit noir sur blanc: «Si la suspension de l'accès aux services de communication au public en ligne peut se concevoir, la suspension de l'accès à la messagerie électronique apparaît excessif et doit être préservé». Néanmoins, l'énoncé de l'amendement ne précise pas de quelle «messagerie électronique» il s'agit. Celle attribuée automatiquement par son FAI? Ou celle que les internautes sont libres de se créer sur Yahoo!, Hotmail ou Gmail?
Bombe à retardement
Interrogé par 20minutes.fr, le groupe PS reconnaît que cette disposition est ambiguë: «Normalement, si votre accès à Internet est coupé, vous ne pouvez pas accéder à vos mails».
L’Assemblée nationale n’y aurait-elle vu que du feu? En réalité, ce sont les auteurs de ces amendements qui sont des petits malins, car cela introduit un «cheval de Troie» dans le principe même de la sanction.
Lionel Tardy, un des députés UMP auteur de ces amendements, explique en effet à 20minutes.fr que le but du jeu était de «rendre l’accès au courrier électronique possible coûte que coûte». Et, cerise sur le gâteau, «ça peut obliger l’Assemblée à maintenir un accès minimal à Internet», même en cas de sanction. Un grain de sable dans l'engrenage?
Toutefois, l’adoption de ces amendements, même avec l’accord du gouvernement, ne met pas forcément en péril l’idée de coupure de la connexion au Web. Car, comme le rappelle le groupe PS, le «gouvernement peut demander à tout moment une deuxième délibération sur ces amendements et les faire revoter». Autre option: après les débats à l'Assemblée, la commission mixte paritaire (CMP) pourra aussi les retirer.
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